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«Le monde de l’entreprise s’est planté» : pourquoi une crise de l’autorité s’intensifie depuis l’an 2000 ?

DÉCRYPTAGE – L’autorité est-elle devenue vintage ? Une vague géante de vacuité nuit-elle durablement à la valeur travail ? Le Figaro vous emmène au coeur de cette crise de l’autorité, dans ce monde sans règles, où tout est «flexible» et où l’on feint de donner une liberté infinie.
«Deux choses menacent le monde, écrit Paul Valéry. L’ordre et le désordre.» Un propos d’une grande simplicité qui relève pourtant du génie. Et qui résume parfaitement la situation dans laquelle se retrouve le monde de l’entreprise qui est atteint du syndrome Montessori : aujourd’hui, les salariés voudraient une liberté totale et faire ce qu’ils veulent partout et à n’importe quel moment. Il n’y a plus de limite : tout est possible. Pour le meilleur, et souvent pour le pire… «Le monde de l’entreprise traverse une grande crise de l’autorité depuis le début des années 2000, analyse Olivier Lajous, officier général de marine, directeur des ressources humaines français, et auteur. Trop longtemps on a cru que l’autorité signifiait le pouvoir sur l’autre, les titres, les grades… C’est ce qui a fait détester l’autorité.»
Les entreprises sont inquiètes, et elles ont raison… «Le rapport au travail est cassé, meurtri, affirme au Figaro d’un air grave Emmanuelle Duez, conférencière et fondatrice du cabinet de conseil The Boson Project. Le travail a perdu de l’importance. Au début des années 90, 60% des Français trouvaient que le travail était un élément fondamental de leur existence. Mais trente ans plus tard, ils ne sont plus que 22%». Le travail serait donc devenu vintage… Une occupation surannée, que l’on fait désormais machinalement, sans enthousiasme, sans rêve, et dans un but le plus souvent alimentaire. «Les travailleurs aujourd’hui ne se reconnaissent plus dans la phrase suivante : «le travail, c’est la vie !», insiste l’entrepreneuse. Alors, il faut réapprendre, via le travail, à vibrer, s’émanciper, créer des relations… La France est particulièrement concernée.»

La fausse religion de l’autonomie

La comparaison avec Montessori, l’école et le monde éducatif n’est pas tirée par les cheveux : les professeurs, comme les dirigeants, vivent chaque jour ce déclin de l’autorité naturelle.

«Professeur est-il encore le plus beau métier du monde ?», s’interrogeait ainsi Philosophie Magazine cet été. Pour réenchanter le travail et les travailleurs, il faut des leaders qui incarnent une autorité nouvelle, compatible avec ce monde complexe, gavé d’intelligences artificielles, d’instantanéité, et de digital. Un monde complexe, qu’il s’agit de sauver, au milieu de mille urgences – climatiques, diplomatiques, sociétales… «Cette érosion de l’autorité et du leadership dans l’entreprise est visible également dans la société civile, observe Emmanuelle Duez. Il n’y a qu’à regarder la vie politique de notre pays et ceux qui l’incarnent.»

Si les prémisses de la crise d’autorité et de la dilution du deal social remontent au début des années 2000, cela n’est pas un hasard.
«Le web, le digital, a tout chamboulé, analyse Olivier Lajous. Il faut ramener des fondamentaux de l’être humain ; le besoin d’être ensemble, de faire société, de faire rêver… Une humanité sans rêve est une humanité violente». Et la crise sanitaire a donné un coup de grâce supplémentaire en faisant croire cette possibilité néfaste à l’entreprise : le monde pourrait donc tourner à distance, depuis chez soi, sans besoin de se voir réellement ? Une vaste blague… À laquelle désormais, plus personne ne croit.
Le Figaro faisait-il y a quelques jours un événement consacré aux entreprises qui ont le blues du télétravail… et qui déchantent, après y avoir cru.
«Le remote forcé et massifié a accéléré la perte de repères, précise Emmanuelle Duez. On a essayé de construire une fausse religion de l’autonomie.» Aujourd’hui, même les aficionados de la distance se repentissent : même Zoom, logiciel de communication vidéo à distance, a rappelé ses équipes…
Comment l’autorité peut-elle redonner de jolies couleurs à l’entreprise et à la valeur travail ? Déjà, en réussissant à stopper intelligemment cette érosion de l’engagement générée par la distance. «Le véritable défi, c’est de rendre capacitaire», écrit Cynthia Fleury. L’autorité a changé de substance. «Aujourd’hui, l’autorité, c’est : savoir naviguer dans l’incertitude, avoir le courage de ses convictions, du discernement, une intelligence de la nuance, énonce Emmanuelle Duez. L’humilité est essentielle également, et savoir s’entourer de gens plus doués que soi-même. Il faut également savoir considérer ses missions comme ponctuelles.» Sans oublier évidemment un élément qui est aujourd’hui perçu comme un gros mot – ce qui est un comble – quand on parle de l’entreprise : la performance.

Merci Le Figaro pour cet article.
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